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#1 16-01-2011 14:16:18

GCM Definitivement
Fan de passage
Date d'inscription: 23-09-2010
Messages: 29

Nathan et Alice (nouvelle)

Nathan et Alice



D’un bond, elle se redresse sur son lit et envoie valdinguer ses couvertures. Tremblotante et paniquée, essoufflée comme si elle avait couru, elle porte la main sur son cÅ“ur pour en calmer les battements. La tête encore chancelante, à peine consciente qu’elle vient de s’arracher d’un mauvais rêve, elle cherche des repères dans le silence de sa chambre. Elle se sent vidée, perdue entre l’angoisse perturbée de son réveil et le soulagement de se retrouver dans son lit, tremblotante, paniquée mais entière; elle tente de recouvrer ses esprits. 
Troublée par la chaleur de la nuit, chamboulée par ce rêve, Alice sent la panique lui parcourir le corps. Sa respiration halète, ses bras et ses cuisses frissonnent, son Cœur lui pique, et ses yeux embués de larmes relâchent tout doucement la pression. Nuit après nuit, ce cauchemar semblait la poursuivre, il semblait la guetter avant qu’elle ne s’endorme, et il la hantait une fois éveillée…
Elle se sentait si seule, tous les jours un peu plus isolée du monde, ne sachant plus gérer le Manque et la Dépendance. Elle se sentait seule, seule à en pleurer. 

Pourtant il était là, à côté d’elle. Son homme, son roc, et son ancrage…
Torse nu, à moitié défroqué, à côté d’elle. Lourdement endormi, à mille lieux de ses préoccupations à elle, si loin de sa souffrance. Si loin d’elle.
Jour après jour, elle se masquait l’évidence. Plus il prenait ses distances avec elle, plus elle s’accrochait à lui, et à ses promesses du passé. Que reste t-il de l’amour propre quand l’Amour nous dévore de part en part.

L’incompréhension régnait entre eux, sans qu’elle puisse en connaître la cause. Les doutes la rongeaient, et certaine fois elle préférerait qu’il parte, qu’il la quitte, qu’il se casse loin d’elle. Qu’il la laisse. Que tout soit simple. Que tout soit clair.
Malgré tout elle le retiendra encore près d’elle quoi que cela lui en coûte. Aussi égoïste que cela puisse paraître, elle sait qu’elle ne pourra pas se résoudre à le laisser foutre le camp comme ça.
Elle l’aime envers et contre tout.
En retombant sur le coussin, encore vacillante, elle tourne son visage vers lui. Et l’embrasse, doucement, dans le creux de l’épaule. Puis, délicatement, d’un geste incertain, de son doigt hésitant, elle trace un cœur invisible sur le haut de son omoplate. Leur rituel rien qu’à eux, comme avant.

Une manière de lui dire qu’elle l’aimera toujours, quoi qu’il en décide…




Comme si c’était la fin du monde, le vent s’était levé sur la baie et la pluie battait contre le carreau. Depuis le pont de Queensboro, Long Island était à peine visible, l’île disparaissait peu à peu sous l’épais nuage de brouillard et de neige. Le taxi avançait tant bien que mal, zigzaguant comme il pouvait entre les voitures au ralenti.
C’était un spectacle extraordinairement banal à Manhattan, et personne ne semblait s’inquiéter plus que d’habitude. La grisaille et les bouchons immesurables étaient parties intégrantes du New York de fin février. Les volutes de fumées qui s’élevaient des pots d’échappements s’éparpillaient en se fondant dans la masse de ce ciel délavé. Donnant, malgré tout, un certain charme à la Grosse Pomme…
   
D’une voiture à l’autre les jurons fusaient, les « avance ta putain de caisse » s’harmonisaient avec les « ferme ta gueule, enculé », les conducteurs sur les nerfs jouaient du klaxon en espérant que l’abruti du devant comprendrait le message.

La pluie battait contre le carreau, et Long Island était maintenant derrière eux. Derrière lui pour toujours. Il avait préféré disparaître, mettre les voiles, laisser la place… A quoi ? A qui ? Il n’en savait rien, un pressentiment, peut-être.
A quelque chose de mieux pour elle. A quelqu’un de mieux que lui, peut-être aussi.
Il l’aimait plus qu’elle ne le savait et elle lui manquerait bien plus qu’il ne pourrait en supporter, son sourire et son souvenir lui crèverait le cœur, à chaque fois davantage… Il lui faudra se réinventer par delà l’Amour, la Solitude et le Manque, le Cœur au dehors de la poitrine, piétiné sur le sol, gorgé de sang et de saletés. Il se rassure en essayant de se convaincre qu’elle sera plus heureuse. Il se déculpabilise en s’assurant qu’elle sera bien plus heureuse avec un autre. Des gouttes coulent de ses yeux, elles filent avant même qu’il n’ait pensé à les retenir.

Nathan avait franchi le point de non retour, et toute sa vie il penserait à cet instant. Le nez collé contre la vitre, il essaie d’apercevoir la baie à travers les trombes d’eau qui s’abattent avec force entre Terre et Mer. Il l’imagine encore endormie, et son estomac se retourne. D’un geste quasi théâtral, délicatement, comme dans les films au cinéma, les yeux perdus dans le vide, vers la ville, il trace un cœur sur la vitre embuée. Comme avant. Plein de honte et d’amertume, ses yeux éclaboussent, il pleure doucement, cherchant à s’expier des regrets qui le dévorent et qui le dévoreront peut-être à jamais…





Et même si elle s’était réveillée plus tôt ce matin là, même si elle l’avait entendu s’enfuir, aurait-elle eu les mots pour le retenir ? Dès son réveil, le lendemain, Alice se posera la question, cette question qui la hantera tout le long des jours de sa vie. Les nuits surtout.
Des questions sans réponse qui relèvent d’un problème insoluble, d’une torture éternelle. Si simple et si tragique à la fois, on aime sa vie, on est heureux, on fait des projets et un matin tout s’écroule. Un matin, Nathan nous quitte, sans un mot, sans un baiser. Sans plus jamais un baiser.

Face contre terre, le Cœur sur le sol, les réponses n’arrivent pas. Tout s’entrechoque dans sa tête, et toutes les images défilent devant ses yeux, une dernière fois comme pour ne pas les oublier. Elle pense à lui, et à comment sera sa vie sans elle. Aussi égocentrique que cela puisse paraître. Parce que quand Nathan s’en va, en prenant son Amour pour elle avec lui, c’est bien à ça qu’elle pense. Comment l’oubliera-t-il, comment rebâtira-t-il sa vie. Le plus injuste c’est de se dire qu’il sera sûrement heureux sans elle, avec une autre, quand il l’aura oublié.

Une migraine folle l’envahit tout à coup, à s’en taper la tête contre les murs, à se crever les yeux de colère, simplement pour arrêter de pleurer.




Le trafic était fluide maintenant. Le taxi avait réussi à quitter la ville, il filait dans le froid matin, à allure illégale sur une petite route de campagne. Les vitres étaient couverte de buée, et l’hindi au volant semblait conduire en aveugle.

Nathan avait passé cette dernière heure le cou à l’envers, fixant un point invisible sur le pare-brise arrière du véhicule. Fixant l’endroit exact où se trouvait la chambre d’Alice au moment où il avait jeté un dernier regard en arrière, en s’engouffrant dans la voiture. Il n’arrivait pas à s’avouer que la dernière image qu’il retiendra d’elle, ce sera cette putain de fenêtre vue depuis l’arrière d’un putain de taxi. Maintenant, quand il pensera à Alice, ce sera comme une fenêtre devant ses yeux, une putain de fenêtre à la con. Depuis qu’il avait fermé la porte de l’appartement derrière lui, il avait déjà envisagé plus de vingt-cinq fois de revenir en arrière, à reprendre sa place au fond du lit, à la prendre doucement dans ses bras, sans la réveiller, comme si de rien n’était, et à pleurer de soulagement; en silence.

Lorsqu’il s’avachissait sur l’appuie tête, à l’arrière de son corbillard, il réussissait à s’endormir quelques secondes, et pendant un instant, il se persuadait qu’il était finalement rentré chez lui, qu’il avait changé d’avis, et que tout ça n’était qu’une vaste connerie. Il s’imaginait alors qu’il avait demandé à l’indien de faire demi-tour, de le ramener à la fenêtre, celle qu’il avait laissé flotter là haut, tout à l’heure, derrière le pare-brise. Mais la vérité lui revenait en plein dans la gueule, à chaque fois plus fort encore.

Il pouvait regretter tout ce qu’il pouvait, il pouvait saigner de toutes les larmes qu’il avait, ça ne changerait rien, maintenant.



C’était fini maintenant.

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#2 16-01-2011 15:47:06

nicole
Nounou du forum
Lieu: charente
Date d'inscription: 20-12-2006
Messages: 64855

Re: Nathan et Alice (nouvelle)

j'aime beaucoup!

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#3 17-01-2011 14:49:58

O-rage
Accro au forum
Date d'inscription: 26-10-2010
Messages: 215

Re: Nathan et Alice (nouvelle)

Je suis un peu surpris par la "respiration qui halète", mais beau texte prenant sur la difficulté de l'amour


Ô rage, Ô désespoir, Ô vieillesse ennemie!

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#4 17-01-2011 16:49:38

GCM Definitivement
Fan de passage
Date d'inscription: 23-09-2010
Messages: 29

Re: Nathan et Alice (nouvelle)

J'ai écris ça comme ça, j'ai pas vraiment refléchi sur la véracité de l'expression, ni même sur l'existence de celle ci. Je crois que tu as raison, je changerai ça dès que j'aurai le temps, merci pour ta remarque, et pour ton gentil commentaire icon_smile

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#5 17-01-2011 17:48:15

recreaflo
Fan confirmé(e)
Date d'inscription: 06-01-2011
Messages: 101
Site web

Re: Nathan et Alice (nouvelle)

J'adore ce genre d'histoires.C'est à vrai ce que je recherche comme lecture(je lis les manuscrits de certains)nouvelles, historiettes, romans. Là chapeau! Il faut persévérer. Les décors bien montés, l'ensemble cohérent, les sentiments y sont bien vivants...Tu as le don et le pouvoir de faire vivre (mourir), voir évoluer tes personnages.Bravo!Continue ainsi, car sincèrement tu iras loin!

Dernière modification par recreaflo (17-01-2011 17:49:12)

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#6 17-01-2011 22:34:37

GCM Definitivement
Fan de passage
Date d'inscription: 23-09-2010
Messages: 29

Re: Nathan et Alice (nouvelle)

Merci énormement recreaflo, je suis très très touché, vraiment =$
Tout ce que tu me dis me fait vraiment plaisir =)

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#7 23-01-2011 19:27:16

petite marmotte
petite fan
Lieu: Bordeaux
Date d'inscription: 04-12-2008
Messages: 315

Re: Nathan et Alice (nouvelle)

Merci pour ce texte, j'aime beaucoup


Ce n'est pas parce que les choses sont difficiles que l'on n'ose pas, c'est parce que l'on n'ose pas qu'elles sont difficiles.

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