Forum Grand Corps Malade et slam

Bonjour à tous,
Comme vous pouvez le constater, je reviens poster après un an de silence.
Rien de mieux qu'un slam pour expliquer ce qu'il s'est passé m'empêchant d'etre présente sur le site.

Bonne lecture à tous, ce slam s'intitule Maman.


Je pourrais vous parler de son tropique ou de son signe astrologique,
Je vais simplement me contenter de vous expliquer sa maladie,
Il est vicieux, apparaît furtivement, d'un coup de baguette magique
Alors que personne ne l'espérait et n'en voulait dans sa vie.

On l'appelle Cancer ou encore maladie longue durée,
Tellement d'homonymes pour essayer de ne pas l'admettre
Mais malheureusement quand il est là, plus rien ne peut le cacher,
Il ridiculise, dé-féminise, change tout notre être.

Quand je le vois prendre place en toi, évoluer et te bousiller,
Je ne peux que le détester voir le haïr
J'ai beau chercher un moyen de t'aider,
Je sais que tout est vain, que tu risque de mourir.

D'abord l'opération, toi seule dans cette chambre stérilisée,
Les larmes aux yeux, le corps tremblant de peur et d'angoisse
Ce regard avant le bloc, signifiant que tu ne te réveilleras peut-être jamais,
Et moi, seule, impuissante, face à cette maladie que je ne peux accepter..

A ton réveil je suis là, je te tiens la main et te rassure;
Mais tout ne fait que commencer;maintenant le produit rouge toutes les 3 semaines,
Il faut que tu tienne, que tu résiste à l'usure,
Je tiendrais ta perf' qui diffuse cette chimio dans tes veines.

Je te vois affaiblie pour la première fois de ma vie,
Le visage gonflé, les muscles fatigués,
A chaque goutte supplémentaire tu semble prendre une décennie,
Soudain tes veines lâchent et ton bras ne peut plus supporter.

Tu vomis allongée dans la cuisine ou dans la douche,
Tu pleure ton ancienne vie, ton bonheur passé,
Tu te recroqueville et ne veut pas qu'on te touche,
Tu ne te supporte plus d'être dans cet état, si blessée.

Et je pleure aussi, je hais mon impuissance
Je voudrais être à la hauteur, savoir quoi faire
Je suis perdue, plus rien n'a de sens,
Je ne dois plus penser, j'ai besoin d'air.

Tu t'arrache le peu de cheveux qu'il te reste,
Tu préfère être chauve et assumer,
Plutôt que de passer pour une aliénée,
Au regard vide et aux émotions décuplées.

Et puis c'est la fin des traitements, je te revois sourire en cet après midi de printemps,
On est à la plage et tu te sens revivre,
Tu enlève ton foulard, dévoilant ton crâne tout blanc,
Mais peu importe, c'qui compte c'est ton envie de vivre.

Les mois s'enchaînent et on réapprend à vivre normalement,
On ne pense plus à ces 24 semaines plongées dans l'enfer,
On s'en est sorties, c'est fini maintenant
Et je sais qu'on pourrait le refaire.

Puis soudain tout ressurgit, une tâche noire sur les radios,
Et tout s'écroule de nouveau,
On rejoue le même scénario,
Qui trouvera une issue à ce jeu malsain,
Je n'en ai plus le courage,
Tu es de nouveau atteint
Par cette maladie qui fait de rage.

Alors oui, je pourrais vous parler de son tropique, de son signe astrologique,
Mais je n'ai qu'une pensée qui me vient,
Pas de belle formulation, de mots idéologiques,
On est malheureusement tous inégaux face à ce putain de destin..