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Les prunelles du môme scrute la clepsydre adossée au mur de la coquerie. Son tic-tac brise le silence, et soudain, ses neurones raisonnent aux six coups du soir.
Dans l'attente de la journée, avec son bouquet d'impatience, le gosse salive, dégluti l'écume en bouche à l'image des pensées, d'un nuage de lait.
La pomme d'Adam ascensorielle danse, dans un va et vient incessant, à chaque écume, surfant sur la vague des sécrétions gustatives.
Ses ouïes s'écarquillent à la montée des marches d'un pas lourd, chaussé de gros godillots, usés par le travail de ce vieil homme mutique, silencieux.
Subrepticement, le môme, sur lui-même, du crépuscule à l'aube, s'illumine. Ses pupilles bleues ensoleillées s'éclipsent de leur sphère, les paupières globulaires s'éclosent à pleines fleurs.
Malgré son âge tendre, les rides du soleil marquent le coin de ses yeux à la seule vue du patriarche, casquette vissée sur la tête.
De sa main indélicate, le pot au lait argenté, en résonne sur le dessus de la cuisinière à bois, au feu étincelant.
Le pt'iot, la chevelure blond blé, trépigne intérieurement, son métronome sanguin, rouge vif au soleil levant, s'abreuve des oxygènes atomiques. La chamade, en explosion, bât la cadence, la tension monte à son paroxysme, la déglutition fait caisse de résonance.
Les secondes du balancement du pendulaire tintent en échos neuronaux et brisent le silence de la pièce.
D'un pas calfeutré, dans de vieilles pantoufles, une main sillonnée par le temps, soulève le couvercle de la gamelle grisée, enivrée des coups passés.
De l'autre, la matriarche trémolo, le relève lentement, hésitante, pour déverser sa substance blanchâtre, enneigée, étincelante comme une source miroitée sous le halo lunaire.
Dans les yeux du marmot, une fontaine sainte, immaculée conception, emplit une casserole poivrée. Au sommet de l'Everest, l'admiration des vagues déferlantes, submergent l'esprit du cht'iot.
Béatitude himalyaesque, l'expectative s'émerveille, s'extasie devant la queue de bois de la coquemar prise en main par la mamie, pour s'apposer sur la cuisinière ronronnant d'une douce chaleur vive du bois crépitant.
Les flammes de l'âtre flamboyant réchauffe le breuvage maméllaire sans en rougir de honte.
La jeune âme contemple les effervescences de cet étang lactescent. Il devra patienter au lent demain matin pour écumer la crème de lait de cet havre de paix, teinté de chaux.
A la louche, il avinera son palet de cette substance nourricière, légère, délicieuse, onctueuse, merveilleuse, généreuse...
Dernière modification par lamalice (21-05-2012 20:06:50)
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Tu m'as emmenée un temps dans la vieille cuisine à regarder avec le petit le lait se verser comme un trésor
Merci pour ce moment hors du temps
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Je perpétue cette "tradition", cette image ancestrale, en allant chercher mon lait à la ferme et à le faire bouillir sur la gazinière et attendre que cela refroidisse pour prendre la crème à pleine bouche sur ma langue... rien que d'y penser ma salive abonde,... et ensuite boire le lait froid et sentir, le vrai lait 100% matière grasse glisser sur mon palet... et la déguster comme une gourmandise ...
Dernière modification par lamalice (08-08-2012 18:43:15)
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cela m'évoque aussi des souvenirs, mais j'ai jamais pu boire de lait, je ne sais pourquoi, alors que j'aime les yaourts , le fromage, ça doit être psychique
mais j'ai beaucoup vu ma grand mère faire avec le lait de chevre de delicieux fromages blancs qu'elle mettait dand des faisselles, et puis dans une boite en bois avec un grillage
le fromage devenait au fil du temps aussi dur qu'un caillou, on l'appelait picodon
merci de l'avoir raconter
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Merci Lamalice pour cette invitation au voyage, un morceau de vies que l'on partage bien loin de la furie des temps dits modernes, comme un retour aux sources quand goûter, attendre, patienter avaient encore tout leur sens ... Juste la clepsydre qui fait tic tac ?? et le pot à lait qui était habituellement en alu plutôt qu'en étain du moins à ce que je m'en souviens , mais que de petites bricoles à coté du merveilleux instant passé à la lecture !!!
Bravo, quelle ambiance, quelle atmosphère des mots justes et sobres même quand ils pourraient paraitre sophistiqués tant le décor est crédible et l'histoire prenante
Merci pour le Partage !!!
Vincent v
Pour Nouga, Nicole, Itess, je suis content de vous avoir téléporter un bref instant à ce moment magique d'une tranche de vie réelle et si bonne... Merci de votre partage et j'espère que votre palet salive en abondance comme les Chutes du Niagara ...
Vincent, si tu laisses ton esprit vagabonder, tu entendras les gouttes d'eau de la clepsydre faire tic tac ... c'est l'art de la tactique poésicale !! ... et là , tu seras en pleine détente totale et presqu'en méditation...
La poésie est-elle si terre à terre que cela ? Faut il qu'elle soit aussi proche de la réalité ?
Pour le pot au lait, j'en ai tenu compte et ai modifié cette partie.
Merci de ta lecture et de tes commentaires constructifs ...
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T'inquiet Lamalice, avec l'age peut être ou l' expérience, ou même les épreuves, on apprend à entendre, à goûter les silences que l'on peut trouver entre les mots, posés comme ça entre leur sens ou tout contre leur contre sens. J'entends bien sur ce " tic tac" des gouttes qui rejoingnent les autres dans l'élan de la chute finale, dans l'oeuvre d'une Vie, un Tic pour l'une, un Tac pour la suivante ... Fabuleux Destin de poser un Tic ou un Tac sur la grande Horloge du Temps et de la Vie ... Oui, quel Fabuleux Destin !!!
Faut il être proche de la réalité ??? Mais que faire de nos Rêves alors ou pire de nos Utopies ??? Non, Rêvons, et Partageons nos Rêves ...
merci
Vincent V
Qu'il est bon de réveiller ces si beaux souvenirs d'enfance.
Rien que pour les revivre j'aimerai remonter le temps,
pour les savourer encore, reprendre plaisir à boire ce lait tiède
juste sortie du pie de la vache.
Rien n'était trafiqué.
Ou les petits déjeuners café au lait avec sa belle peau.
Merci de m'avoir fait revivre ces délicieux moments de mon enfance
chez mes grands parents maternels.
Douceur
Dernière modification par Douceur (24-05-2012 21:27:28)
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Les mots sont choisis avec exactitude, les yeux fermés ont s'y croirait !
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Tiens, ma grande soeur est de retour, ... et oui, et ces souvenirs sont à jamais gravés dans nos mémoires, elles font Notre Histoire...
A quand de te lire dans un écrit de ta main ?
Bises et courage ...
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