Forum Grand Corps Malade et slam

Quand Fabien est venu au Sébasto, dans les rappels, il nous a donné un texte sur les "vers" ... je me suis dit que l'humble élève se devait de présenter un exercice de son cru au Maître ....
à Fabien

Je suis vert


Je suis vert, que des vers trop verts puissent tant plaire,
Qu’aussi amères, ils puissent plaire à des pères verts,
Comme d’un aster, un vers mangerait les verts
Pour offrir la fleur nue aux regards pervers.
Je suis vert et colère quand un vers de travers
Parle mal d’une écolière ou d’une mère.

Je suis vert, comme un père au quai ou sur la mer,
Quand pécheur au vers ou au chalut arrière,
C’est dans la mer que je cherche avec des prières
Le vermeil des rougets ou les lieus au dos vert,
Scrutant dans les brumes, tous les amers à terre,
Essuyant d’un bord ou d’un port mon ciré vert.

Je suis vert, comme une mer certains soirs d’hiver,
Quand seul l’épais verre d’une  fenêtre tempère
L’assaut éphémère d’une trop verte colère,
Laissant seul au verre rempli d’un vieux sylvaner,
Le drôle de rôle  d’endormir un vieux père
Qui espère que sa fille deviendra mère.

Je suis vers, comme ce doux rêveur qui espère,
Qu’en vers l’envers des vers serait moins austère,
Qu’en vers l’envers des guerres serait moins éphémère,
Je suis vert comme un jeune rameau de bruyère,
Comme le revers caché d’un poète frère
Qui perd ses vers et pourtant toujours persévère.

Je suis vert, comme le vertige de la terre,
Avide de verres d’eau claire et de bol d’air,
Les yeux verts grands ouverts sur les sites nucléaires,
Le bras, armé de fer pour nettoyer ma terre,
Et ainsi  féré, faire à Aragon un prés vert,
Pour qu’en vers aux vers, je rende mes os à la terre.

Je suis vert, comme toutes les colères éphémères,
Je suis vert, comme l’espoir des pousses printanières,
Je suis verre, comme la vitre claire qui tempère,
Je suis verre, comme la boule qui flotte en mer,
Je suis vers, comme les mots de colère passagère,
Je suis vers, comme les mots d’un Amour sincère.


       
            Vincent V